Flore Marvaud
(1982, vit à Vitry-sur-Seine)
Je m’intéresse depuis une dizaine d’années aux concepts que je qualifie d’ « essentiels » parce qu’ils relèvent de l’essence de notre fonctionnement d’humain (vérité, beauté, perfection, individualité, mort, etc.).
Par le biais de projets polymorphes (installations plastiques, sonores, vidéo et/ou textuelles), je souhaite en requestionner le sens qui, même s’il semble, à première vue, si évident, si simple, voire universel, se révèle au fur et à mesure beaucoup plus complexe à définir.
Multiplicité des sens, contradictions, stratifications et correspondances s’entrechoquent. Alors le doute s’installe et les questions commencent.
Qu’est-ce qui nous rend réel ?
Comment articuler individualité et environnement social ?
Pourquoi établir des ponts entre soi et les autres, entre notre vision et celle des autres ?
Qui crée qui ?
Qu’est-ce qu’exister ?
En reprenant les mots de Anne Mœglin-Delcroix (dans l’article L’art comme alternative à la philosophie : un défi d’artiste), l’art travaille la vie comme un matériau, de façon à y faire surgir des questions éthiques et politiques.
Il tente d’être l’instrument ponctuel d’une prise de conscience personnelle, un instrument qui aiderait l’homme à se libérer des conditionnements et des préjugés qui l’empêchent de tendre vers sa vérité.
A travers ces projets/objets, je souhaite mettre en exergue le mystère de notre fonctionnement, de nos origines, de notre pensée, et ainsi partager mon envie de non réponse, du principe de questionnement comme objectif.
Pour se faire, je pars d’une impulsion, d’un envahissement que je théorise. Pendant plusieurs années, je fais ainsi des allers-retour entre émotions et réflexions jusqu’à trouver le point limite qui marquera la fin, l’aboutissement toujours sur le fil.
En fonction du sentiment touché et du concept développé, l’objet trouve sa forme : tout matériau étant susceptible d’être utilisé et mélangé, puisque, pour chacun, nous lui avons trouvé un rôle, une représentation différente d’un autre support (le bois ne véhicule pas le même imaginaire que le métal, etc.).
La technique (et le choix de la technique) ne dirige pas mon travail, elle ne doit pas être un frein, le fond en est l’essence. Sans matière de prédilection, je défriche, à chaque nouveau projet, des techniques pour répondre aux besoins du propos. Cette expérimentation de nouveaux matériaux et/ou de nouvelles interactions entre matériaux provoque chez moi l’instabilité nécessaire à questionner immanquablement ma pratique. La fragilité qu’impose cette exploration incessante m’aide à plonger au plus profond de moi.